
Muriel Barbery
Une heure de ferveur
Roman
En regardant la neige se poser sur les pierres d’un torrent, le jeune Haru Ueno pressent que sa vie va s’inscrire sous le signe de l’harmonie : rechercher, capter, servir et honorer la beauté des formes. Il quitte ses montagnes natales de Takayama, se passionne pour l’art, s’impose comme un marchand renommé. Aussi chaleureux qu’indépendant, toujours entouré d’amitié, Haru s’adonne pleinement au bonheur des rencontres, des fêtes au lendemain desquelles il est de retour dans sa maison dont le cœur abrite un érable et qu’entourent temples et jardins de Kyōto. De ce lieu rare, il a fait un havre. Il veut y passer une vie lumineuse, ignore combien elle sera empreinte de drames où, à la douleur du Japon, se mêle sa quête fervente des métamorphoses de la beauté. Haru a une trentaine d’années quand son destin lui en offre la plus belle manifestation – et à jamais l’en prive. Car quelque part en France, fruit d’une liaison éphémère, une petite fille est venue au monde. Elle s’appelle Rose. Il lui est interdit de l’approcher, bien qu’elle incarne désormais le secret, la vérité et probablement toute l’âme de son existence.
Depuis son premier roman, Muriel Barbery se confronte aux nuances de l’altérité. Aucun endroit, aucun paysage, aucun personnage ne pouvait lui offrir un tel territoire d’imaginaires et de sensibilités.
Une heure de ferveur est né du désir de revenir sur les traces de l’héroïne d’Une rose seule en passant par l’autre côté : celui du père. Je rêvais d’un récit en miroir où Rose, à son tour, deviendrait l’absente. De quelle façon, à l’autre bout du monde, Haru Ueno était-il devenu le père d’une enfant qu’il lui serait interdit de voir ? Comment avait-il vécu à Kyōto, autre personnage central des deux textes et seul territoire qui, par-delà la mort, les réunirait un jour ? Lorsque le roman s’ouvre, Haru, au soir de sa vie, se remémore les fils qui l’ont tissée : les rencontres, l’art, les femmes, les affaires – et sa fille lointaine. Pour la première fois, j’avais le désir d’ancrer la narration dans la durée, dans les quatre décennies durant lesquelles, par la paternité, ce marchand d’art prospère, séducteur et noceur fait face à une autre part de lui-même. Alors, je l’ai découvert solitaire et mélancolique mais fort, aussi, de son amour pour Rose, de sa soif de beauté et de son goût de l’amitié. Autour de lui, Keisuke, Sayoko, Beth et Paul, épaulés de nouveaux personnages kyōtoïtes, composent une communauté soudée. Tous, comme Haru, sont en quête d’une forme de grâce et seront confrontés à des tragédies intimes. Pour saisir ce rythme long de la vie qui passe et use, j’ai voulu un texte prolixe en événements et personnages mais porté par une écriture et une structure épurées qui donnent à ressentir l’implacabilité de la marche du temps. Enfin, j’ai pris le pas de la lenteur et de la contemplation pour avoir une chance de capter ce qui, à la fin, reste en nous de ferveur.”
– Muriel Barbery
A propos de l’auteure
Muriel Barbery
Muriel Barbery est l’auteure de six romans dont Une rose seule, publié aux éditions Actes Sud en 2019 et en Babel en 2022.